Awa Diagne : Les confessions de << Ya Khandiou >>, ancienne actrice de Daaray Kocc

<< Khandiou, un DG peut en cacher un autre, Yadikone >>, ces pièces cultes

<< A l’époque, c’était extrêmement difficile d’être comédienne. Nous n’étions pas bien vues. Malheureusement, les Sénégalais ne retiennent que le rôle que vous incarnez, pour vous coller une étiquette et vous juger. Le théâtre est un métier comme tout autre. Il arrivait même que certains parents refusent l’union de leurs enfants avec une comédienne. Et pourtant, on participait à l’éducation des moeurs à travers nos rôles. C’était le cas dans des pièces cultes comme << Khandiou >>. Elle m’a beaucoup marquée. C’était une pièce qui traitait d’une amitié sincère comme on n’en voit plus. L’amitié de Khandiou et Ndaté était unique en son genre. Il y a également mon rôle dans << Lapiss la pakh bine bine >>. Moustapha y interprétait le rôle d’un handicapé dont j’étais éperdument amoureuse, seulement mes parents refusaient notre union. C’était en 1981. Dans cette pièce, nous avons essayé de montrer que nous sommes tous égaux. Les handicapés font partie intégrante de la société. << Yadikone >> aussi m’a marquée. Dans cette pièce, nous étions des jeunes filles, des ménagères venues dans la capitale pour travailler et l’une d’entre nous est tombée enceinte du fils de sa patronne. Nous n’étions pas payées et nous le faisions par amour. A l’époque, il n’y avait qu’une seule télévision. C’est elle qui produisait et diffusait. Nous soumettions un devis à leur appréciation, dans lequel nos cachets étaient inclus. Une fois seulement que c’était validé, on commençait à enegistrer. Maintenant, c’est le contraire qui se passe, les groupes tournent d’abord et vendent le produit fini aux télévision.>>

Le dernier acte… Retrait de la scène

<< Ma toute dernière apparition dans une pièce de théâtre remonte en 1991, dans << Un dg peut en cacher un autre >>. Aprés quoi, j’ai décidé de rendre le tablier. C’était avant tout, par choix. << Daaray Kocc >>, c’est une famille. D’ailleurs, nous sommes sept personnes à l’avoir mise sur pied. Nous étions soudés. Nous le sommes jusqu’à présent. Mais, je me suis retirée par ce que je le voulais. Je me sentais un peu perdue. Et, j’ai pris l’initiative de prendre du recul, de peser le pour et le contre. C’est comme ça que j’ai décidé de me retirer pour le bon. Le théâtre m’a tout donné. Au delà de la notoriété, il m’a permis d’avoir beaucoup d’opportunités et ouvert des portes. Tous les comédiens de la troupe avaient une profession. J’étais secrétaire. Et quand j’ai décroché, je suis retournée à mon métier. Par la suite, j’ai intégré la radio Sud Fm, par l’entremise d’une amie, Feue Reine Marie Faye. Elle m’avait proposé de poser ma voix pour une publicité et j’ai fini par être employée à la radio. Dans un premier temps, je faisais les avis et communiqués, puis l’animation,avant de finir à laa rédaction. J’ai été formée sur le tas. Sud Fm est pour moi une école, j’y suis restée pendant 6 mois.

<< L’Italie, le luxembourg >>, ces points de chute

<< Je n’avais aucune raison de partir à l’étranger. J’avais tous les avantages possibles ici. J’ai profité d’un congé pour me rendre en France. Par la suite, je suis allée en Italie pour rendre visite à mes nièces. C’est elles qui m’ont convaicue de rester là-bas. C’est mon destin. Au bout de 3 ans (en 2002), j’ai eu mes papiers, grâce à une loi qui avait été promulguée. C’est en 2006 que j’ai réussi à obtenir un travail. J’avais la chance de vivre avant , chez mon frère, qui subvenait à mes besoins. J’avais fait une formation d’aide infirmière. Et, j’ai pu obtenir un boulot dans une maison de retraite. Je venais en aide à de vieilles personnes qui ne pouvaient plus faire usage de leurs membres. C’est le même métier que je fais au Luxembourg où je vis depuis 2016. Avec cette crise, le pays n’a plus grand chose à offrir.>>

Les regrets…<< Si j’étais restée au Sénégal >>

<< J’ai beaucoup de regrets. Mais c’était mon destin. En partant à l’extérieur, j’avais un visa de 15 jours. C’est avec mon argent de poche que j’ai acheté mon billet. Toutes les personnes avec qui j’ai travaillé ont maintenant des postes de responsabilité. Si j’étais restée, ma situation aurait sans doute évolué. L’immigration est vraiment difficile. Ceux qui traversent l’Atlantique pour rallier l’Europe se font du mal pour rien. Car en Europe, pour la pluspart, ont un traumatisme psychologique. Je ne conseille à personne de tenter cette aventure. A Paris, je vivais avec une amie. J’y ai passé une semaine. Et, aprés, j’ai vécu avec mon frère en Italie. Par la suite, j’ai vécu avec mon neveu. Je n’ai jamais été dans un centre. Au Luxemburg, j’habite dans ma maison. C’est un pays où il fait trés cher à vivre. Mais je rends grace à Dieu. Actuellement à prendre une retraite anticipée. Faux ongles, faux cils, Make-up, cheveux naturels, << trop d’artifices chez les actrices d’aujourd’hui >>

<< Je regarde quelques sééries qui passent sur le petit écran, comme « maitresse d’un homme marié », « gloire », « choix », par ce que j’ai des amis qui y tiennent des rôles. Il y en a beaucoup et certaines sont diffusées le même jour et pratiquement aux mêmes heures. Il est clair que les choses ont beaucoup évolué. Malheureusement pas seulement, dans le bon sens. Les mentalités ont changé, de même que les accoutrements. On se rend compte qu’on mise énormément sur le paraître. Les filles mettent des faux cils, de faux ongles, font du Make-up, portent des cheveux naturels, pour jouer des scènes où elles sont entrain de faire la cuisine ou sont couchées dans un lit pour dormir. Ce n’est pas du tout naturel, tout st superficiel. De notre temps, lorsqu’on interprétait un rôle, on se donnait à fond. Le décor, les costumes, la tenue, tout y passait. Par exemple, s’il fallait jouer un rôle où on se couchait dans un lit pour dormir la nuit, on portait une robe de chambre et attachait un foulard, sans maquillage, sans bijoux. On prenait le soin de cacher ertaines parties de notre corps.>>

Oui à la révolution du cinéma, non à la banalisation de notre culture…

<< Je peux comprendre que les générations ne sont pas les mêmes. Il y en a qui disent que nous sommes passées de mode. Je pense que ce n’est pas le cas. Un artiste ne << vieillit >> jamais, nous sommes toujours à la page. Même si nous ne sommes pas sur un plateau en train de tourner, notre art nous sert dans d’autres milieux. Si vous faites la remarque, les anciens sont de plus en plus sollicités pour jouer dans les les nouvelles productions. On a besoin de leur expérience. Moi-même j’ai reçu beaucoup de prpositions. Toutefois, je préfère être en retrait pour le moment. Plus tard, je changerais peut-être d’avis. Ce qui est certain, c’est qu’il y’a des rôles que je n’interpréterais pour tout l’or du monde. Je prendrais mon temps pour bien étudier les sénaris. Un rôle, il ne faut pas le prendre pour le prendre. Il faut toujours penser à demain, surtout pour une femme qui est appelée à se marier et fonder un foyer. Les archives seront toujours là pour nous rappeler ce que nous avons fait par le passé. Avant, les spectateurs étaient pressés qu’on soit mardi pour investir leurs salons et regarder les pièces de théâtre. Non seulement, nous faisions passer des messages forts, mais on éveillait les consciences. Cela se fait toujours, mais c’est la manière qui ne sied pas. Le cinéma sénégalais a pris son envol et est en passe de devenir une industrie. Ce n’est pas plus mal car dans toute chose, l’évolution est importante. Cependant, il faudrait qu’on tienne compte de nos valeurs, de nos réalités et de notre culture.>>

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