[Éditorial] Pap Ndiaye, Mais Pourquoi Tant De Haine ?
Florilège de cette excommunication immédiate. Marine Le Pen, cette fois, s’est déchaînée la première: “la nomination de cet indigéniste assumé est la dernière pierre de la déconstruction de notre pays, de ses valeurs et de son avenir”. Éric Zemmour a aussitôt pris le relais, en en rajoutant: “Emmanuel Macron avait dit qu’il fallait déconstruire l’histoire de France. Pap Ndiaye va s’en charger”. Retenons aussi la saillie du député LR Julien Aubert, candidat déclaré à la présidence de son parti: “ce ministre est le cheval de Troie du gauchisme américain, porteur du wokisme et du racialisme. Sans négliger l’inévitable Éric Ciotti , lui aussi en piste pour prendre la direction de LR et qui en rajoute tant qu’il peut dans la virulence dénonciatrice: “un adepte de l’islamo-gauchisme et un militant anti-flics. Terrifiant”!
“Un indigéniste cheval de Troie de l’empire étoilé, racialiste et anti-flic.” Voilà la musique et le refrain, aux relents comme à l’accoutumée douteux, une façon à peine habile d’induire que le nouveau ministre ne serait qu’un “ennemi de l’intérieur”, un “agent infiltré” au sommet de l’État sans même avoir besoin de signifier son ascendance sénégalaise par son père. L’ignominie intacte de l’extrême-droite. Car, si l’on peut contester, voire s’opposer, à certaines positions et analyses du ministre, il n’est pas nécessaire de caricaturer, de travestir, de dénaturer. Deux éditorialistes brillants du Figaro, Vincent Trémolet de Villers et Guillaume Tabard s’inquiètent, et c’est un euphémisme, des postulats politiques et idéologiques de Pap Ndiaye. Ils s’y emploient avec intelligence et précision. Quand l’un estime que “l’éminent historien est le chantre d’un discours diversitaire, décolonial directement importé des campus américains”, l’autre insiste sur cette “transgression spectaculaire et surprenante”… Pour la condamner, cela va de soi, mais rien d’insultant. Une opposition et une contestation légitimes et dignes. À la hauteur de ce personnage, de cet historien, de cet écrivain, de ce ministre désormais, fait lui aussi tout entier de dignité.
Un républicain universaliste pur produit de la méritocratie