Enquête sur l’âpre carrière d’Ameth Béchir Ndiaye, Commissaire de Wakhinane

Ameth Béchir Ndiaye, le désormais ex-chef de poste de Police de Wakhinane-Nimzath, relevé de ses fonctions, à la suite du décès de l’émigré Cheikh Niass, a un parcours épatant. L’Observateur retrace, avec les témoignages de proches et anciens collaborateurs, l’itinéraire d’un policier très à cheval avec ses principes.
Cet après-midi, il est l’homme le plus épié. Il est très attendu. La petite foule qui s’est formée, hier lundi, dans la cour du poste de police de Wakhinane-Nimzath, cette commune située dans le département de Guédiawaye, guette l’arrivée du «héros». L’homme qui a eu le «courage» de tenir tête à sa hiérarchie après qu’il a été relevé de ses fonctions de chef de poste de Police de la localité, suite au décès d l’émigré Cheikh Niass, le 23 septembre 2021. Le lundi, jour de passation de service avec son successeur, le Lieutenant Ahmet Béchir Ndiaye a préféré faire faux bond. Une absence qui a obligé le Commissaire central de Guédiawaye, venu présider la cérémonie avec son collègue de Pikine, à installer officiellement le Lieutenant Mamadou Faye qui était en service à la Sûreté urbaine de Dakar. Cette position affichée par le chef de poste déchu est une suite logique à la démarche qu’il a adoptée avec les termes accablants de la lettre qu’il a adressée au ministre de l’Intérieur, Félix Antoine Diome. (Voir L’Observateur d’hier lundi). Une sortie fracassante dans laquelle, il s’insurge contre l’absence de soutien de ses supérieurs et dénonce une cabale contre sa personne. Cette colère de Ameth Béchir Ndiaye, exprimée d’un ton haut, a fait du bruit en haut lieu.

«Il a une fois menacé de démissionner lors de son affectation au Gmi»
Seulement, le radicalisme dans lequel l’Officier de police est versé ne semble pas surprendre les personnes qui l’ont connu. Le Brigadier-Chef à la retraite, Mame Ndiouga Dia, en fait partie. Il loue ses qualités professionnelles et raconte une anecdote : «Je l’ai connu sérieux et doué. En plus, c’est un excellent enquêteur. Lorsqu’il est passé Officier de Police, il m’a confié un jour qu’il allait démissionner, car ne pouvant comprendre qu’un enquêteur chevronné comme lui soit affecté au Groupement mobile d’intervention (Gmi) pendant que des éléments plus jeunes sont orientés vers les services, comme si lui ne pouvait être utile à la Sécurité publique.» Mais, Ameh Béchir reviendra à de meilleurs sentiments après que Mame Ndiouga Dia a réussi «à l’en dissuader. C’est comme ça qu’il a fini par renoncer à sa démission», se rappelle le Brigadier-Chef à la retraite.
D’après d’autres témoignages, le chef de poste déchu et natif de Darah Djoloff est un homme «têtu, qui s’accroche à ses principes». Mais, il est réputé fidèle en amitié et très proche de ses éléments. «Les éléments qu’il a commandés peuvent le certifier, il est très proche de ses hommes. Même s’il affirme son autorité, il le fait avec humilité», rapporte un de ses anciens collaborateurs. Pourtant, tout n’a pas été donné pour l’ex-chef de service du poste de police de Wakhinane-Nimzath qui a intégré l’Ecole Nationale de Police (Enp) en 1989-1990, pour faire partie de la 24e promotion d’élèves Gardiens de la paix.

A sa sortie, lors de son passage au Gmi, il est affecté en Casamance au plus fort de la confrontation entre les militaires et les rebelles du Mouvement des forces démocratiques de la Casamance (Mfdc). «Soldat avant d’être policier, parce qu’ayant fait le Centre d’initiation militaire de Bango pendant deux années, son séjour comme élément du Gmi dans la zone sud a participé à forger son caractère», témoigne un Commandant du corps urbain à la retraite, sous le couvert de l’anonymat. Pendant qu’il était au Gmi, Ameth Béchir Ndiaye est coopté pour faire partie du contingent des forces de l’ordre du Sénégal en mission à l’étranger.
Très ambitieux et doté d’un Quotient intellectuel (Qi) largement au-dessus de la moyenne, le Gardien de la paix d’alors va, à son retour de la zone sud, préparer et réussir brillamment le concours professionnel des Inspecteurs de police. Il retourne ainsi à Enp pour faire partie de la 37e promotion des Inspecteurs de police en 2006. Après sa formation et avec le grade d’Inspecteur, il servira dans plusieurs commissariats avant d’étrenner les galons de Lieutenant pour hériter du poste de police de Malika, suivi d’un retour à la Direction de l’Autonomisation du Ficher (Daf).

Traîné en Justice par une commerçante pour abus d’autorité
Son parcours, jugé honorable par la plupart de ses collègues, n’est pas sans tache. Il avait été traduit en Justice pour abus d’autorité. Cette affaire avait été relayée, en son temps, par le quotidien «Les Echos». Une commerçante à qui Ameth Béchir Ndiaye avait donné un magasin en location à Malika, l’avait accusé de l’avoir déguerpie de force du local. Une expulsion musclée qui avait poussé la dame à saisir le parquet, par le biais d’une plainte, pour abus d’autorité. Des faits que le Brigadier-Chef à la retraite, Mame Ndiouga Dia, met sur le compte d’un «simple énervement». Car pour lui, «le Lieutenant Ahmet Béchir Ndiaye n’est pas un brigand». L’affaire est toujours pendante en Justice.

Titulaire d’un Diplôme en Passation de marchés publics
C’est connu et les policiers s’en plaignent : Le métier de «flic» n’est jamais facile. Entre la gâchette, le règlement et les arrangements, la frontière est ténue. «C’est parce qu’il n’est pas un fou de la gâchette que le Lieutenant Ahmet Béchir Ndiaye a choisi de prendre entièrement en charge sa formation en Passation des marchés à l’Autorité de régulation des marchés publics (Armp)», confie un de ses proches. Une formation sanctionnée par un diplôme délivré par l’Armp. Un document qu’il exhibe fièrement, d’après des proches, et qui pourrait lui faciliter une reconversion au cas où la sanction de la hiérarchie policière l’écarte du corps qu’il a servi. «Avec honneur et loyauté», juge-t-on.
ALASSANE HANNE

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