“la Belgique N’a Pas Peur De Regarder Son Passé Colonial”

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La Belgique n’a pas peur de regarder son passé colonial”
La visite “historique” du couple royale en République démocratique du Congo “a permis de souligner la richesse de la relation entre nos deux pays”, a estimé en fin de mission le secrétaire d’État en charge de la Politique scientifique, Thomas Dermine, lors d’une interview accordée à l’agence Belga.

“Une page importante est en train de se tourner”, analyse M. Dermine. “Avec la restitution d’œuvres spoliées lors de la période coloniale, de la dépouille de Patrice Lumumba ou encore la commission d’enquête au Parlement. Il y a une forme d’introspection qui montre que la Belgique n’a pas peur de regarder ce passé colonial, y compris avec ses zones d’ombre qui ont été reconnues dans le discours très important du roi Philippe à Kinshasa. Mais comme l’a souligné le président congolais, il faut aujourd’hui regarder vers l’avenir, construire le futur à travers des relations commerciales fortes, la coopération technique au développement et le rôle que peut jouer la Belgique dans le contexte sécuritaire extrêmement tendu à l’est du Congo.”

Et les excuses?
Pour le secrétaire d’État, la question des éventuelles excuses du souverain est importante, mais pas prépondérante. “Ce qu’on voit ici, c’est que ces questions sémantiques pèsent relativement peu par rapport à la manière dont on construit l’avenir de la jeunesse dans ce pays, aux impératifs du quotidien”, commente-t-il.

Thomas Dermine, qui a accompagné le couple royal de Kinshasa à Bukavu en passant par Lubumbashi, a noté “l’attachement phénoménal du Congo à la Belgique”. “On a vu des manifestations le long des routes, dans les stades, les universités… Partout où le Roi est passé il était accompagné d’une mobilisation très importante. Cela montre que ce sentiment, qui résulte de notre passé commun, existe encore. Cela doit nous encourager à entretenir cette relation privilégiée”, préconise-t-il.

Le “Congo est et restera le premier bénéficiaire de l’aide belge”, assure le secrétaire d’État. Pour autant, il ne faut pas “être aveugle” sur les progrès qui doivent être accomplis en RDC, en matière de gouvernance, de climat des affaires, de sécurité juridique ou encore de lutte contre l’économie informelle. Et ce, “pour offrir des possibilités d’émancipation à la jeunesse congolaise”.

Remise du masque, tout un symbole
En matière de sécurité, la visite du couple royal dans l’est du pays, dans un contexte sécuritaire actuel, montre que cette question est “au cœur des préoccupations de la Belgique”, note-t-il encore. Le principal aspect de la visite relevant des compétences de M. Dermine a été la remise d’un masque au Musée national de Kinshasa. “C’est une première étape, en matière de restitution, qui visait à démontrer tout le sérieux de la Belgique sur cette question”, se félicite-t-il.

Trentenaire, le secrétaire d’État estime que “les générations jouent un rôle” dans le réchauffement de la relation belgo-congolaise. “Plus on a de distance temporelle avec la colonisation, plus on peut être critique à cet égard, il y a moins de lien émotionnel. Seul un ministre du gouvernement actuel a, à peine, connu l’époque de la colonisation. Tandis que du côté congolais, le président Tshisekedi est né après l’indépendance. La plupart de nos interlocuteurs sont nés dans les années 70 ou 80, ils ont donc une relation tout à fait différente avec la Belgique de ceux qui ont connu la période coloniale.”

“Le parrain avec qui on s’est réconciliés”
“L’avenir que nous incarnons est plus important que le passé”, confirme le porte-parole du gouvernement congolais, Patrick Muyaya. “La Belgique, c’est spécial pour nous, ce sont nos oncles qui ont co-créé le Congo, le parrain avec lequel on s’est réconciliés. C’est notre porte d’entrée dans la diplomatie internationale, nous devons donc avoir des rapports moins clivants que ceux que nous avons eus par le passé. Mais les besoins du Congo sont énormes, la coopération ne réglera pas tous nos problèmes.”

Le ministre congolais relève aussi qu'”un grand pas a été franchi avec les mots lourds du Roi, la remise du masque ou encore la décoration du caporal Kunyuku. C’est une reconnaissance de notre passé commun, cela donne l’importance qu’il faut.”

D’ici quelques jours, le retour des reliques de Lumumba, “ce sera la consécration” qui viendra conclure une séquence de quatre mois durant laquelle il s’est passé “plus de choses que durant les 10 années précédentes”, s’enthousiasme M. Muyaya. “Avec la visite, cela vient panser des plaies tout en ouvrant de nouvelles perspectives pour l’avenir.” 
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