Mais où donc disparaissent les sages? Par Khady GADIAGA

Le Sénégal expérimente actuellement la pire des situations semblant déjà déboucher sur des lendemains sombres.
Dans quelle mesure ce qu’on pourrait appeler «solutions de compromis » sont-elles envisageables ou souhaitables ?
Cette réflexion est, d’une certaine manière, un pari (optimiste) sur l’avenir en ce sens qu’elle s’appuie sur la conviction que l’idée de compromis a de l’avenir devant elle, qu’elle est porteuse d’espoir.

 

Ce compromis pouvant être garanti par des piliers solides, prévisibles et rassurants, des ancres auxquelles on peut s’accrocher par gros temps, qui animent la vie sociale et ont l’étoffe de contraindre les décisions politiques,  si le vivre-ensemble devient menacé. Des sages qui ne dérivent point et se laissent emporter de d’invisibles courants sous-marins cachés au fond d’abysses noirs.

Des sages qui à l’opposé du dirigeant qui mise sur la force, se sont  affranchis de la force, et  qui tiennent leur conscience éveillée.

Des piliers qui n’ont pas cédé à l’instar d’une certaine élite intellectuelle attentiste et la caste des dignitaires coutumiers et religieux, plus courtisans qu’acteurs de solidarité.

Des références comme feu Abdou Aziz Sy Dabakh et son discours d’apaisement vibrant, rassénérant et opératoire, qui proposent des valeurs d’intégration, donc des valeurs qui se construisent dans le dialogue intérieur, dans le dialogue avec les autres et dans l’expérience concrète.

Dès lors une question existentielle se pose: la politique peut-elle subsister sans transcendance?

Même exclu en principe du champ politique, le religieux impose sa présence dans les sociétés. C’est récemment, quand la démocratie est devenue abstraite, sans idée du tout social, sans corps même puisque détachée du support de l’action commune que sont les peuples et les nations, que la séparation s’est vraiment imposée, provoquant l’exclusion, la mise hors débat, des idées et des représentations venues du religieux.

Quand le débat était entre « conceptions du monde » dans des nations autonomes, la religion y avait ses entrées à cause de la nature des enjeux aussi bien qu’à cause de l’identité historique du sujet appelé à décider.

Le religieux peut-il subsister s’il ne fait plus lien ? S’il ne réunit pas un peuple ?
– Les êtres humains en société peuvent-ils rester moraux, sans comprendre en quoi leurs actions sont en rapport avec quelque chose au-dessus d’eux ?
Quel dispositif peut réfléchir sur la manière dont le religieux et le politique, tout en restant séparés, peuvent coopérer? Le religieux peut-il être une soupape de respiration pour le politique ?

Réconcilier l’homme et le citoyen

Notre substrat religieux a vraisemblablement son utilité politique pour donner un horizon à une politique naguère triomphante, dont l’essoufflement ou le délabrement fait maintenant peur.

Un projet qui peut  « réconcilier l’homme et le citoyen». À s’isoler dans son champ propre, la citoyenneté s’est appauvrie. Naguère, quand le slogan « tout est politique » avait cours, l’attraction du politique inquiétait comme une menace, on craignait les passions qu’elle pouvait mobiliser. Désormais, elle apparaît paralysée de deux côtés, doublement, par les contraintes extérieures et par les demandes de droits individuels garantis qui comportent désormais non seulement les droits personnels, politiques et sociaux mais aussi le « droit à une identité », de sexe, d’origine, de lieu …

La question devient de savoir si la religion en lui communiquant un certain élan moral peut aider la politique à dépasser le niveau où s’affrontent les intérêts, les prétentions et les identités?

K.G. 02 juin 2023

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