Une délégation érythréenne en Éthiopie pour mettre fin à la guerre

Une délégation du gouvernement d’Érythrée a rendu mardi une visite historique en Éthiopie afin de mettre fin à des décennies de conflit entre ces deux voisins.
C’est un moment historique : l’Éthiopie et l’Érythrée ont vanté les mérites de la paix, mardi 26 juin à Addis Abeba. Une délégation gouvernementale érythréenne s’est rendue sur place afin de mettre un point final à des décennies d’hostilité entre les deux voisins de la Corne de l’Afrique. Une visite inimaginable il y a encore quelques semaines.

Au cours d’un dîner au Palais national éthiopien, le Premier ministre réformateur Ahmed Abiy, assis entre le ministre érythréen des Affaires étrangères Osman Saleh et le conseiller spécial du président Issaias, Yemane Gebreab, a assuré que la paix entre les deux pays apporterait de nombreux bénéfices à la Corne de l’Afrique, notamment commerciaux. “Nous avons le même sentiment à Asmara”, la capitale érythréenne, a répondu Yemane Gebreab, sous les applaudissements.

Plus tôt dans la journée, la délégation érythréenne avait été accueillie en fanfare et sur un tapis rouge par le Premier ministre Abiy, à l’aéroport d’Addis Abeba, ainsi que par des personnalités éthiopiennes du monde de la culture et du sport, comme le légendaire coureur éthiopien Haile Gebreselassie. Ahmed Abiy et la délégation érythréenne s’étaient ensuite retirés pour des discussions.

Réformes sans précédent en Éthiopie

Le chef d’État éthiopien, 42 ans, a pris ses fonctions en avril et a depuis amorcé un train de réformes sans précédent depuis plus de 25 ans dans le deuxième pays le plus peuplé d’Afrique. Au nombre de ces bouleversements, l’annonce début juin de son intention d’appliquer l’accord de paix signé en 2000 avec l’Érythrée et les conclusions de la commission internationale indépendante sur la démarcation de la frontière.

Les deux pays se sont livré de 1998 à 2000 une meurtrière guerre conventionnelle, avec chars d’assaut et tranchées, qui a fait quelque 80 000 morts, notamment en raison d’un désaccord sur leur frontière commune. Le refus éthiopien d’appliquer une décision en 2002 d’une commission soutenue par l’ONU sur le tracé de la frontière a ensuite, entre autres, entretenu l’animosité entre les deux pays.

Répondant à la main tendue du régime éthiopien, le président érythréen Issaias Afeworki a annoncé la semaine dernière l’envoi de cette délégation en Éthiopie pour discuter d’une paix entre les deux ennemis jurés, en réponse aux “signaux positifs” venant d’Addis Abeba.

Ménager les sensibilités en Éthiopie

Cette réponse du président Issaias avait également tranché avec les habituelles diatribes du leader érythréen, à la tête depuis 1993 d’un des régimes les plus fermés et les plus répressifs au monde, qui justifie depuis des années l’emprisonnement de dissidents et la conscription obligatoire par la nécessité de se défendre contre l’Éthiopie.

Si la décision de Ahmed Abiy a été saluée par la communauté internationale, elle a été accueillie avec défiance par les habitants de la ville symbole de Badme, accordée à l’Érythrée en 2002. L’Éthiopie n’a d’ailleurs pas indiqué quand ses troupes quitteraient cette localité, dont les 18 000 habitants éthiopiens redoutent de se retrouver sous la coupe de leur ancien ennemi.

Le Premier ministre éthiopien, qui a également annoncé la libéralisation partielle de l’économie éthiopienne et a procédé à des remaniements au sein de l’appareil sécuritaire, va devoir montrer sa capacité à concrétiser son ouverture vers l’Érythrée tout en ménageant les sensibilités dans son pays.

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