CONTRÔLE DE SENTEER SARL : Quand tous les coups sont permis entre un oncle et son neveu…

Ce qui devait être une réussite familiale s’est transformé en un vrai champ de bataille, opposant un oncle à son neveu. Après des séjours réguliers à l’extérieur, Khabane Fall nourrit l’idée de vendre la destination Sénégal à des investisseurs étrangers. C’est ainsi qu’en 2010, il rencontre des investisseurs en Espagne. L’un d’entre eux deviendra l’un des co-gérants de la Société à responsabilité Limitée, la Sénégalaise des Travaux d’équipements agricoles et des Énergies renouvelables (SENTEER). Mais on n’en est pas encore là.

En 2011, le groupe des investisseurs constitués d’un ingénieur agronome du nom de Vicent Salvador, José Andres Diaz, accompagné de Khabane Fall débarque au Sénégal pour une prospection. L’occasion pour eux de rencontrer Khalila Ibrahima Fall qui à l’époque, était déjà le président de la communauté rurale de Keur Samba Kane, dans le département de Bambey. Actuellement, il est député-maire de cette zone devenue à la faveur de l’acte 3 de la Décentralisation, une commune.

Après plusieurs réunions, la SENTEER est portée sur les fonts baptismaux. Khalila Ibrahima Fall et José Andres Diaz sont les co-gérants de la nouvelle entreprise. Pour ce qui le concerne, le président de la Communauté rurale de Keur Samba Kane est proposé par son neveu Khabane Fall qui, de ce qu’il a confié à Dakaractu, s’est contenté de 22% des parts contre 30% pour son oncle paternel. La centrale thermo-solaire devait avoir une capacité de 250 MW pour un investissement avoisinant les 250 milliards FCFA.

Finalement, la Centrale sera un mort-né en raison de divergences avec la Senelec malgré l’agrément numéro 03131 obtenu de l’Etat du Sénégal et signé le 06 décembre 2012 par un certain Aly Ngouille Ndiaye, alors ministre de l’Energie et des Mines. Ce projet enterré, cap sur une autre opportunité. Les forages. Accompagnée par une grande entreprise espagnole intervenant dans le domaine de l’eau, SENTEER commence à décrocher des marchés.

Contacté par Dakaractu pour connaître son rôle dans les premiers pas de cette entreprise, l’ancien co-gérant fait savoir qu’il a déboursé au total pas moins de 150 000 euros (66 millions). « Grâce au travail que nous avons faits, Khabane Fall et moi, nous avons réussi à construire beaucoup de forages au Sénégal. SENTEER était devenue une entreprise pionnière pour la question de l’eau », renseigne-t-il. Preuve de la bonne financière de la société, elle a gagné une trentaine de marchés de forages pour plus de 08 milliards de francs CFA.

Mais selon Khabane Fall et ses associés espagnols, la société n’était pas pour autant bien gérée et ou souffrait d’une gestion solitaire. À l’en croire, les comptes n’étaient pas bien tenus et aucune assemblée générale n’a été enregistrée depuis sa création. « Khalil a repris l’entreprise, signant des chèques sans mon autorisation », déplore à son tour José Andres. « C’est ce qui m’a amené à vouloir vendre mes parts dans SENTEER », martèle l’entrepreneur espagnol qui finalement, a cédé ses 38% à Khalil Ibrahima Fall et à Khabane Fall. On est en 2015.

Dès lors, les parts étaient ainsi réparties : Khabane Fall (38%), Khalil Ibrahima Fall (46%) et Vicent Salvador (16%).

N’étant plus en odeur de sainteté avec son oncle paternel qu’il dit avoir lui même proposé comme co-gérant lors de la création de SENTEER, Khabane Fall entreprend des actions pour reprendre l’entreprise en main. Le 21 mars 2019, il lui fait parvenir une sommation valant mise en demeure pour la tenue d’une Assemblée Générale. Face à l’absence de réponse de son oncle, il n’avait d’autre choix que d’actionner ses avocats pour que le gérant soit contraint de tenir une assemblée générale.

Mais c’était sans compter sur la détermination du député-maire Khalil Ibrahima Fall de rester à la tête de la SARL. Entre-temps, il intente des actions judiciaires contre son neveu qu’il accuse de gagner des marchés de plus d’un milliard sur le dos de SENTEER. L’affaire n’est pas encore vidée par le tribunal de Pikine. Mais pour le dossier, Khabane Fall aura fait 5 mois de prison, entre juillet et novembre 2019 avant d’obtenir une liberté provisoire.

À sa sortie de prison, le neveu reprend les démarches pour destituer son oncle. Chose qu’il réussit le 12 février dernier à la faveur d’une Assemblée générale à laquelle le Tribunal du Commerce Hors classe de Dakar a désigné un mandataire. Vicent Salvador qui détient 16% des parts était aussi présent. Vu que les détenteurs de la majorité des parts (54%) étaient présents, la destitution de Khalil Ibrahima Fall est passée comme lettre à la poste.

La même Assemblée générale intronisera par la même occasion son neveu Khabane Fall, comme nouveau patron de la société SENTEER, avec comme associé Vicent Salvador qui désignera plus tard Placido Alvarez comme son représentant. Placido Alvarez est aussi le directeur de la société Perfibesa qui fournit en matériel SENTEER.

Une cérémonie de passation de service a été organisée le 10 avril dernier. Mais pas l’ombre du député-maire dont l’absence a été constatée par un huissier. Selon son neveu, il fait des pieds et des mains pour le faire « coffrer » à nouveau. « Il compte sur ses appuis bien nichés au cœur du pouvoir pour réussir son coup », dénonce véhémentement cet ancien émigré qui déplore « la main invisible » qui soutient son oncle dans cette affaire. « Je ne dois pas être traité de la sorte. J’ai beaucoup fait pour mon pays. Ce n’est pas juste tout ce qu’on me fait subir parce que tout simplement je veux reprendre quelque chose qui me revient de droit », se plaint l’entrepreneur.

Quant à son oncle de député, Dakaractu l’a appelé au téléphone et lui a envoyé trois messages pour lui permettre de donner sa version des faits. Mais jusqu’à la rédaction de cet article, il n’a pas répondu…

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