La Honteuse Indifférence Au Sort D’un «otage» Nommé Roch Marc (par Madiambal Diagne)
Roch était-il le mauvais camarade du syndicat des chefs d’Etat ?
Quand la légitimité électorale et populaire ne sert plus à rien en Afrique de l’Ouest
Qui pourrait se prévaloir d’une légitimité plus affirmée à la tête de son pays que Roch Marc Christian Kaboré ? Il avait été élu pour la première fois le 29 novembre 2015, au premier tour de scrutin avec un taux de 53,49% pour un premier mandat de cinq ans. Une élection saluée pour sa régularité et sa transparence et qui était donnée en exemple à travers le monde. Rebelote ! Le 22 novembre 2020, Roch Marc Christian Kaboré est réélu, toujours au premier tour de scrutin, avec un score de 57,87% des voix. A cette dernière élection, Eddie Komboïgo, le candidat du Cdp, le parti de l’ancien Président Compaoré, était arrivé deuxième avec 15,54% des voix, tandis que l’opposant historique Zéphyrin Diabré de l’Upc occupait la troisième place avec 12,46% des voix. Encore une fois, l’élection a été transparente et les candidats défaits avaient reconnu la victoire du Président sortant. Zéphyrin Diabré avait même accepté de répondre à la main tendue du nouveau vainqueur, qui prônait l’unité nationale afin de répondre aux défis sécuritaires et économiques auxquels le Burkina Faso reste confronté. Zéphyrin Diabré a été nommé ministre d’Etat auprès du Président du Faso, en charge de la Réconciliation nationale et de la cohésion sociale. Malheureusement, des militaires qui ont fini par révéler qu’ils avaient été inspirés par les caciques du régime de Blaise Compaoré, se sont emparés du pouvoir. Les bidasses dirigés par le Lieutenant Damiba n’avaient pas besoin d’aller trop loin pour justifier leur coup. Ils ont copié la rhétorique et la façon de faire des militaires maliens. Ainsi, le prétexte tout trouvé est l’insécurité dans une partie du pays, en proie à des exactions de bandes d’islamistes armés. Dire que pour le même alibi, le Colonel Zoungrana avait lui aussi cherché à renverser le Président Kaboré, quelques semaines plus tôt. Seulement, on constate que les bandes armées continuent, de plus belle, de dicter leur loi aux Forces de sécurité et de défense du Burkina Faso. En effet, depuis que son coup est consommé, le Colonel Damiba n’a pas encore trouvé urgent et nécessaire d’engager un front pour délivrer son pays des islamistes qui tuent des populations civiles et des gendarmes. Rien que la semaine dernière, une attaque de djihadistes a fait 36 morts dont 23 civils et 13 gendarmes dans la région de Dori, dans le Nord-Est du pays. Dans cette même zone géographique, les localités de Inata, Djibo et Titao sont tombées entre les mains des islamistes depuis un mois. Le bilan des nouvelles pertes dans la région, dépasse la centaine de tués. Ironie du sort, le Général Aimé Barthélemy Simporé, qui était ministre de la Défense du dernier gouvernement du Président Kaboré, garde son portefeuille sous la junte. De même que le Colonel Omar Bationo, Secrétaire général de la Défense nationale, qui est nommé ministre de l’Administration territoriale, de la décentralisation et de la sécurité. Allez savoir comment on peut corriger les carences sécuritaires de Roch Marc Christian Kaboré en demandant à ses mêmes ministres de rester en poste. Tous les deux ont même pris du galon !
La leçon de l’histoire est qu’il ne suffit plus d’être légitimement et démocratiquement élu pour pouvoir rester à la tête d’un Etat, et que n’importe quel militaire détenteur d’armes létales peut imposer sa loi et s’installer comme chef d’Etat. Qui ne se rappelle pas qu’à la veille de son installation, le 2 avril 2021, le Président nigérien, Mohamed Bazoum, avait failli être emporté par une tentative de coup d’Etat militaire ?
L’histoire rattrape ceux qui fêtaient les putschistes
Trois mois après le putsch du Colonel Damiba, c’est le temps des regrets pour de nombreuses élites politiques et intellectuelles au Burkina Faso. Pourtant, ils se montraient enthousiastes, de nombreux Burkinabè, à l’idée de voir les militaires prendre le pouvoir et promettre de chasser illico presto les islamistes. Ces militaires ne semblent pas avoir la main plus heureuse que leurs camarades maliens. La situation empire. Le Burkina Faso s’enfonce dans le marasme sécuritaire et économique. La classe politique malienne et la Société civile reviennent de leurs désillusions quant aux promesses et professions de foi de Asssimi Goïta. En Guinée, Cellou Dalein Diallo dit, à haute et intelligible voix, toute sa déception causée par les putschistes du Colonel Doumbouya. On ne va pas remuer le couteau dans la plaie pour rappeler que nous avions pourtant prévenu ! Il reste que la Société civile africaine et les démocrates de tous horizons devraient se préoccuper du sort de Roch Marc Kaboré, ne serait-ce que pour se donner bonne conscience ! La Cedeao, qui doit avoir déjà réalisé que les militaires burkinabè la tournent en bourrique, devrait vaincre sa frilosité.