«El Hadji Oumar TALL, géant de l’Histoire» par M. Amadou Bal BA

I – El Hadji Omar et l’Islamisation de l’Afrique de l’Ouest

A – El Hadji Omar TALL, le savant et le miraculeux

L’épopée qui magnifie El Hadji Omar TALL accentue son côté combattant de la foi en y intégrant miracles et magie noire. Seule compte l’image du «gigantesque cavalier entouré d’un halo de lumière qui galope sur son destrier, pour disparaître à l’horizon» écrit Emile DUCOUDRAY. Les écrits de Cheikh Moussa CAMARA et de Mamadou Aliou THIAM ont renforcé cette dimension mystique d’El Hadji Omar TALL, le «Waliyou» (miraculeux et savant). Lors de son séjour à l’université Al Azar, en Egypte, sous Méhémet ALI (1769-1849) ses hôtes furent surpris par l’étendue de ses connaissances : «Le bélier universel à la tache noire à la tête, a compris toutes les sciences. (..) Tant enfin ils furent saisis de ces prodiges que fut la façon dont répondit le Cheikh à ces questions profondes, ardues, qui ne sont pas faciles. C’est un savant qui a compris toute chose qu’il a lue. C’est un homme qui excelle en connaissance profonde, il ne se trompe jamais» écrit Mohamadou Aliou THIAM.

D’une grande simplicité et généreux, El Hadji Omar, grand communicateur, les griots du Mali lui ont consacré une chanson traditionnelle, désormais attachée à son nom : «Tara» ; cette chanson était initialement un éloge funèbre, mais ses origines lointaines sont peules et se rattachent à l’histoire d’un chant ancien, le Yééla. Les qualités personnelles d’El Hadji Omar TALL ont été reconnues de tous : «Cet homme à qui on s’accorde à reconnaître une grande éloquence, n’eût pas de peine à se faire passer aux yeux des Noirs du Sénégal, pour un être extraordinaire, doué d’un pouvoir surnaturel ; on croyait toute espèce de miracle possible de sa part ; on en racontait déjà» écrit la Revue Sénégal et dépendances de 1861. Paul SOLEILLET (1842-1886) a décrit El Hadj Omar. Ses yeux étaient expressifs, ses traits réguliers. Sans moustache, sa barbe était noire, soyeuse, partagée au menton. Il ne parut jamais avoir plus de trente ans. Personne ne l’avait jamais vu se moucher, cracher, suer, ni avoir chaud, ni avoir froid. Il pouvait rester indéfiniment sans manger, ni boire. Ses mains et ses pieds étaient parfaits. Il ne parut jamais fatigué de marcher, d’être à cheval ou immobile sur une natte. Sa voix était douce et s’entendait distinctement aussi bien de loin que de près. Il n’a jamais ri, ni pleuré, jamais il ne s’est mis en colère. Son visage était toujours calme et souriant. «La Justice est le droit de l’Homme, dans ce monde et dans l’autre ; là où la justice des hommes aura été en faute, celle de Dieu ne faillira» dit El Hadji Omar.

Homme modeste, érudit et doté de vastes connaissances, on prête à El Hadji Omar de nombreux miracles. Il aurait fait le Ramadan le premier jour de sa naissance : «Quand il naquit il refusa d’être allaité, les gens pensèrent qu’il était malade. (..) Les sages dirent : «ce bébé n’est pas souffrant, mais peut-être qu’il a en lui quelque chose de mystérieux. Peut-être que c’est un Saint» écrit Samba DIOP dans «Epopée africaine». Dès l’âge de quatre ans, son maître coranique a avoué qu’il est en avance sur lui. A huit ans, il savait par cœur tout le Coran qu’il avait mémorisé. Talibé, il ne va quémander la pitance, mais à l’heure de présentation de la sébile, la sienne est bien achalandée. Aux champs, il refuse de cultiver, mais les parties dont il a la charge sont dégagées de toutes mauvaises herbes. Il traverse le fleuve, comme le Moïse de la Bible. Dans tout ce qu’il faisait, il semblait avoir le soutien des génies qui lui avaient prédit qu’il n’aura pas de funérailles. Il vaincra les païens, mais les «incirconcis aux oreilles rouges» domineront le continent noir. En Syrie, Omar guérit l’enfant handicapé d’un roi, Ibrahim Pacha (1789-1848). Dans son histoire du Sokoto, El Hadj Saïdou relate qu’il a sauvé de la soif une expédition menée contre le Gober en faisant venir, par ses prières l’eau dans un puit à sec, sans qu’une goutte d’eau ne se perdît à l’extérieur des murailles.

Omar TALL avait de l’éloquence et de la finesse. Ainsi, au Caire, les chefs religieux étaient sceptiques, un Noir pouvait-il en savoir autant qu’eux ? Ils le convoquèrent pour l’interroger et sonder ses connaissances théologiques. Un rhéteur malicieux lui lance, sournoisement, cette attaque : «O Miracles, exagération descendant du Prophète, rhétorique science toute splendeur que tu sois, mon âme se dégoûtera de toi si tu t’enveloppes de noir» lui dit un de ses détracteurs. La tradition orale défendue par Mahamadou Aliou THIAM, rapporte qu’El Omar répondit, brillamment, et triompha de tous les pièges, en leur clouant le bec : «L’enveloppe n’a jamais amoindri la valeur du trésor qui s’y trouve enfermé, Donc Ȏ poète inconséquent, ne tourne plus autour de la Kaaba, maison sacrée d’Allah, car elle est enveloppée de noir. Ȏ poète inattentif, ne lis donc plus le Coran, car ses versets sont écrits en noir. Ne réponds donc plus à l’appel de la prière, car le premier ton, fut donné, et sur l’ordre de Mohammed notre modèle par l’abyssin Bilal, donc un noir. Hâte-toi de renoncer à ta tête couverte de cheveux noirs. N’oublie pas que c’est avec l’irremplaçable prunelle noire que l’œil parvient à discerner. Chez moi, dans le Tekrour, tout noirs que nous soyons, l’art de la grossièreté n’est cultivé que par les esclaves et les bouffons».

Né au temps des Almamy du Fouta-Toro qui ont instauré une République théocratique depuis 1776, El Hadj Omar TALL n’a pas été accepté facilement dans son pays. Le Jihad qu’il préconise et les troupes qu’il veut lever au Fouta-Toro, ainsi que la tentative de conciliation avec le colonisateur, ont été des sources de dissentiment avec les Almamy antiesclavagistes et résolument en guerre contre l’occupant français. Par ailleurs, El Hadj Omar a introduit la confrérie Tijiania en Afrique de l’Afrique de l’Ouest. Or les Almamy du Fouta-Toro sont d’une autre confrérie, celle des Qadriyya, dont le fondateur, au XIIème siècle, est l’iranien Abdel Kader El Jilani (1079-1166). Le tidjanisme omarien rejette toute hiérarchie sociale et prône l’égalité de tous les hommes, et «allait devenir une africanité, une négritude avant la lettre» écrit Gérard CHENET. En effet, les adeptes du Tidjanisme, se fondent le Coran et la tradition prophétique, et se réfèrent, en particulier, tous à son fondateur, Cheikh Amet Tidjani, par la grâce et sainteté que lui a accordées le Seigneur, clôt l’arrivée de tout prophète ou envoyé de Dieu. Le Tidjanisme introduit le Wird (invocations obligatoires pour tout affilié), les Hizbs (prières écrites ou conseillées par le fondateur), le Wazifa (série de litanies et de prières spécifiques à réciter chaque jour), et respectent les 23 règles fondamentales de la confrérie, dont le Maouloud ou la célébration de l’anniversaire du Prophète, Mohamet.

A la suite de l’assassinat de l’Almamy, Abdoul Kader KANE le 4 avril 1807, en raison des rivalités et des dissensions entre les familles nobles, le Fouta-Toro est plongé dans une crise morale très profonde. El Hadji a dénoncé, avec virulence, l’affaissement de ces valeurs morales au Fouta-Toro, contraires, selon lui, à l’Islam : «Vous êtes comme des infidèles, buvant et mangeant l’injustice, et vos chefs violent la loi de Dieu, en opprimant les faibles» dit-il. Cependant, «nul n’étant prophète dans son pays» comme le dit un adage, El Hadji Omar TALL a failli être assassiné suite à un complot ourdi par Boubacar Aly Doundé, fils d’un chef des Bosséyabé. Avant de repartir en Guinée, il envoya ce message aux chefs du Fouta-Toro : «Vous avez refusé de me suivre pour travailler avec moi, à la conversion des infidèles. Mais, dans un temps, qui n’est pas éloigné, vous accourez tous, sans que je vous appelle» écrit-il.

Cheikh Moussa CAMARA, un des biographesd’El Hadji Oumar, a rappelé qu’il n’est pas un descendant du Prophète Mohamet. Il réitère le caractère fondamentalement peul d’El Hadji Oumar qui a renversé les royaumes Bambaras, jadis ennemis jurés des Toucouleurs. Pour Cheikh Moussa CAMARA, en dépit de ses grandes qualités, El Hadji Oumar est un mortel ; cependant, il a un pouvoir spirituel immense. Ainsi, pendant son voyage à la Mecque, il s’était engagé sur le chemin de terre fort dangereux et infesté de brigands. Il récitait pendant ses prières «Celui qui a ouvert ce qui avait été fermé» et il a échappé à tous les désagréments.

B – El Hadji Omar, le Jihadiste : balayer et nettoyer les pays du paganisme

A son retour de la Mecque, El Hadj Omar est devenu «un homme mûr et grave, instruit par ses lectures, ses conversations et ses nombreux voyages. Si la science de Dieu a été sa principale préoccupation, on peut penser qu’il avait aussi gardé les yeux ouverts sur le monde profane» écrit Yves SAINT-MARTIN. En effet, El Hadji Omar repart en Guinée, au Fouta-Djalon, et s’installe à Dinguiraye, en 1849, avec l’accord Yimba SAKHO, chef animiste des Diallonké de Tamba, qu’il paie en or, pour préparer la guerre sainte. «S’exiler, c’est s’enrichir» avait-il coutume de dire. «Un homme extraordinaire, de race Foulah, prenait une grande influence sur ses compatriotes. (…) Son renom de sainteté attirait autour de lui un si grand nombre de disciples qu’il put songer à en faire une armée» écrit J. PINCHON. «El Hadj achète, vend de la poudre d’or qu’il tire du Bouré, arme ses élèves, cultive, remplit ses greniers de mil et se fortifie. Possédant déjà une véritable armée qui chaque jour, grossissait» écrit Eugène MAGE. Il fait bâtir cette mosquée, en forme de meule, ressemblant à une grande case, avec l’aide d’Ousmane Diawando, ainsi qu’un «Tata» (fortification). A partir de ce moment, le colonisateur considéra qu’il menaçait ses intérêts : «Un plus redoutable adversaire se rencontra dans un marabout Toucouleur, Cheikh El Hadji Omar. (…) Etablit en 1848, entre les deux fleuves, à Dinguiraye, il se transporta au Nord du Sénégal, dans le Kaarta, pillant nos traitants et proclamant même qu’il conduirait ses troupes à Saint-Louis» écrit Henri WALLON. Dans la guerre sainte qu’il prépare, El Hadji Omar commence d’abord par avoir un territoire, des munitions et une armée solide dirigée par Alpha Oumar Thierno Baïla WANE, de Kanel dans le Damga, un fidèle des fidèles du «Sultan des Saints», comme le surnomment les Fountankais. Alpha Oumar lui achète le fameux cheval surnommé «M’Bollou», à Bokar Yéro Mody de Galoya. Il recrute notamment Thierno Mollé du Bosséya, fait Moqaddem. El Ehadji se fait assister, pour le génie militaire, par Samba BATHILY dit Samba N’DIAYE, d’origine Soninké et ancien otage pendant vingt ans à Saint-Louis.

Dans son appel à la guerre sainte, El Hadji Omar se remémore le passé prestigieux des Foutankais, flattant ainsi leurs égos : «Les fils du Fouta sont tels que nos premiers ancêtres ; laborieux et forts, la fine fleur de l’humanité et des droits. Fils du Fouta, retournez à vos origines : le Jihad contre les ennemis d’Allah (…). Le Mont Sinaï est à votre berceau à cause du Jihad. Fils du Fouta soyez dignes de vos ancêtres» dit El Hadji Omar. Il est sans doute influencé par la guerre sainte, au Nigéria, initiée par Ousmane DAN FODIO (1754-1817), sultan du Sokoto. El Hadj Omar voulait lancer la restauration et la réforme de l’Islam, en recourant au Jihad, estimant qu’il est investi, dans cette mission, par le Seigneur, la rétribution étant le paradis. El Hadji Omar se fonde explicitement sur un mysticisme inspiré de la Tidianiya, mettant l’accent sur la mortification et l’observation rigoureuse de l’Islam, par une série de rites. La tradition orale soutient qu’El Hadji Omar, un Mahdi investi d’une mission divine, serait le continuateur de l’action de Mahomet (571-632) : «Auparavant, je n’avais été autorisé par Mahomet et Cheikh Ahmet Tidjane qu’à rallier les incroyants à l’Islam et à les guider sur la voie correcte (…) ; puis j’ai été chargé de lancer le Jihad. (…) L’autorisation m’en a été donnée par une voix divine qui m’a dit : «Tu as maintenant la permission de conduire le Jihad. Cela se passerait le 6 septembre 1852» affirme El Hadji Omar. Mamadou Aliou THIAM affirme que l’autorisation de faire le Jihad aurait été donnée, pendant le voyage à la Mecque, par Mohamed El-GHALI : «Va balayer les pays ; c’est-à-dire va les nettoyer du paganisme. C’est là une mission de propagation de la foi par la guerre sainte» écrit THIAM. Mamadou Aïssata DIAKITE, petit-fils d’un Soninké disciple d’El Hadji, dans sa biographie, n’effleure que ce thème. «Le vieux monde africain, regénéré par la demi-civilisation musulmane, galvanisé par le fanatisme pressent que c’est par le fanatisme et par cette brèche de la vallée du Sénégal, que la race européenne, avec son cortège d’idées et d’institutions, pénétrera, avant peu, jusqu’au cœur de ce continent arriéré, il cherche à se défendre de cette invasion» écrit Louis FAIDHERBE. Naturellement, le colonisateur s’est évertué à démontrer que le Jihad est proscrit par les temps modernes : «Parmi les populations indigènes que nous avons eu à coloniser, il y a une ethnique qui n’acceptera jamais notre domination. Et il se trouve que cette ethnie est très répandue sur notre espace de colonisation. Il est urgent et impératif, pour notre présence en Afrique, de réussir à la diviser et leur opposer les autres ethnies moins rebelles. Car le jour où les Peuls se regrouperont, ils peuvent balayer sur leur passage toutes les forces coloniales» écrit FAIDHERBE.

A Dinguiraye, il prépare le Jihad (guerre sainte). Il acquiert une réputation de saint et rassemble de nombreux disciples qui formeront les cadres de son armée. Son armée, équipée d’armes légères européennes reçues de trafiquants britanniques de Sierra-Leone, s’attaque d’abord à Tamba, dont le chef, Yimba SAKHO, avait une réputation de cruauté terrible ; on l’accusait de donner des captifs en pâture aux vautours sacrés de son village. Par ailleurs le roi de Tamba, outre l’armement d’El Hadji qui l’inquiétait, est mécontent de la conversion à l’islam d’un de ses sujets : Diély Moussa DIABAKATE. El Hadji Omar inflige en même temps une sévère défaite à Labata, un village allié et à Bandiougou KEITA, un descendant de Soundiata venu soutenir Tamba, lors du siège de six mois. Cette victoire lui ouvre l’accès au cours supérieur du Bafing et contrôlant ainsi les voies des mines d’or du Haut-Falémé, du Bambouk et du Bouré. Quittant la Guinée, il laisse la direction de Dinguiraye à une de ses filles, Aguibou. De 1850 à 1857, il s’empare du Bambouk et du Kaarta. Il occupe, quelques années plus tard, le Nioro, alors capitale du royaume païen des peuples bambaras, fondant ainsi un empire s’étendant du Haut-Sénégal à la Gambie. Il occupe, sans difficulté, les territoires du Mandingue et du Bambouk en 1853, avec leurs mines d’or. Il campe près du poste de Sénoudebou, et fait connaître au gouverneur de Bakel son intention de rester en paix avec les Français et propose, avec de l’or, de leur acheter des fusils et canons. Le gouverneur du Sénégal, Auguste-Léopold PROTET (1808-1862) rejette cette offre. El Hadji Omar attaque alors Makhana, chef lieu du Kaméra, et fait décapiter tous les hommes. Faidherbe fait fortifier Bakel, ce qui dissuadera les incursions d’El Hadji Omar.

El Hadi Omar affronte les Bambaras Massassi dont il prend la capitale Nioro et Ségou entre 1854 et 1861. En 1856, il annexe le royaume bambara du Kaarta et réprime sévèrement les révoltes. Luttant contre l’armée coloniale française, il fait construire, une fortification, à Koniakary non loin de Kayes. El Hadji Omar est rejoint par Alpha Oumar Thierno Baïla WANE. «Rien dans le Soudan occidental ne pouvait plus résister à El Hadj ; ceux qui auraient voulu se défendre étaient à la tête d’esclaves trop démoralisés pour résister à des hommes libres et fanatiques» écrit Eugène MAGE.

En avril 1857, il déclare la guerre contre le royaume du Khasso et assiège le fort de Médine, point stratégique pour le contrôle des routes menant vers la Mauritanie, la Guinée, la Gambie et le Sud-Ouest du Sénégal. Jusqu’à Podor, tout commerce, pour le colonisateur français était devenu impossible. Des villages entiers du Fouta, du Boundou et du Dimat sont sous ses ordres. Faidherbe met en place un poste de défense en septembre 1855 à Médine, car Bakel, est en révolte. Le 20 avril 1857, El Hadji Omar TALL attaque Médine, défendu par Paul HOLLE, un mulâtre saint-Louisien, avec 7 Européens 22 Sénégalais et 36 matelots. Mais ces faibles troupes n’auraient pas suffi à repousser les 20 000 fantassins d’El Hadji Omar. La défaite d’El Hadj est due, en partie, à l’indiscipline de Hamat Kouro WANE dit «Hadé Wadda» (celui qui fait ce qu’on lui défend). L’absence du stratège militaire, Alpha Oumar Thierno Baïla, qui n’était pas de l’expédition, resté au commandement du Nioro et Kaarta, a pénalisé El Hadj Omar. Par ailleurs, en grand stratège, Faidherbe a rassemblé à Médine tous les éléments, issus du Logo et du Kasso, hostiles à El Hadj Omar. Le gouverneur du Sénégal a mobilisé au total 580 hommes, avec des fusils, munitions et des barils de poudre, ainsi que divers alliés africains à la botte du colonisateur, : Fara Penda M’BODJ, nommé chef du Oualo, Boubacar Sada du Boundou, Babacar Ould Souedi Amet, chef des Douaich, des Maures. Pour faire face au Jihad d’El Hadji Omar, Faidherbe va conclure divers traités de paix : le 20 mai 1858 avec le Trarza, le 10 juin 1858 avec les Maures Brakna, le 18 août 1858, avec l’Almamy du Boundou et les chefs du Bambouk, le 19 août 1858 avec les chefs du Guoy, le 18 avril 1859 avec le Toro, le 10 septembre 1859 avec le Damga, une province du Fouta, particulièrement rebelle.

C’était l’époque où la domination française commençait à s’affirmer sur tout le Sénégal. En 1857, les troupes de Faidherbe et celles d’El Hadj Omar s’affrontèrent à Médine, puis à Matam du 13 au 16 avril 1859. C’est en août 1860, à Bakel, qu’un traité de paix fut signé entre Thierno Moussa, représentant d’El Hadji Omar, et les Français dont l’autorité est reconnue sur la rive gauche du fleuve, et la rive droite restant sous influence d’El Hadji Omar. «Tout pillage, toute expédition de guerre cessera d’un côté, comme de l’autre. Les sujets de l’un des pays n’iront pas en armes dans l’autre pays. Le commerce se fera librement entre les deux pays ; nous vendrons à El Hadj tout ce qu’il nous demandera», points 4 et 5 du traité.

Entre 1859 et 1862, El Hadji Omar remporte ses conquêtes sur le Niger et brise la résistance des Diawara en installant les Toucouleurs sur le Kingui. Marcoïa est pris le 20 novembre 1859 et le 22 mai 1860, les Bambaras venus au secours des Diawara connaissent une défaite à N’Ganno. Niamina, ville commerçante du Niger est conquise le 25 mai 1860.

El Hadj Oumar TALL s’attaqua aux royaumes bambaras de Kaarta et de Ségou, dirigés par les Diarra. En entrant dans Ségou, le 10 mars 1861, «il prenait possession du palais et des trésors accumulés depuis des siècles par les divers rois qui s’étaient succédés dans ce pays. Les différents chefs captifs écrirent, par des marabouts de l’intérieur, qu’ils voulaient se rendre à El Hadj. (…) Il imposait à tous de se raser la tête, de ne plus boire de liqueurs fermentées, de faire le Salam, de ne plus manger de chien, de chevaux, ni d’animaux morts de maladie ; il prenait des otages pour en faire des soldats», écrit Eugène MAGE. Les fétiches et temples païens sont détruits. En 1862, il confie Ségou à son fils Ahmadou, pour partir à la conquête d’Hamdallaye, capitale de l’Empire peul du Macina qui tombera le 16 mars 1862. Il est curieux de constater qu’El Hadji Omar ait fait la guerre contre Amadou Mo Amadou (Amadou fils d’Amadou, en Peul), petit-fils du fondateur du Macina, qui n’était pas un idolâtre, mais un musulman jugé hypocrite et non sincère : «il est notre petit-fils, son père est notre fils, et son grand-père est notre oncle et ami. (…) L’action est plus éloquente que la parole. Lorsque la parole et l’action divergent, prends en considération l’action» dit El Hadji Omar.

En effet, Amadou Mo Amadou avait préconisé à El Hadj Omar de ne pas poursuivre Ali DIARRA, le roi de Ségou en fuite qui cherchait à reprendre son trône «Si je t’ai demandé la paix, c’est que les gens de mon pays le désiraient ; Quant à moi, j’ai toujours souhaité me battre contre toi, si tu ne viens pas m’attaquer, je marcherai contre toi» dit Amadou Mo Amadou. Après plusieurs échanges de lettres, El Hadji Omar finira par se défendre contre les attaques d’Amadou Mo Amadou, qui sera capturé après sa fuite et décapité le 15 mai 1862. Les trésors d’Amadou Mo Amadou entassés à Tombouctou furent récupérés. La vie d’Ali DIARRA, roi de Ségou est épargnée, mais il est mis aux fers.

Le 16 mai 1862, El Hadj Omar prend la capitale du Macina : Hamdallaye «Trois jours après son entrée à Hamdallaye, tout le Macina, chefs en tête, venait faire sa soumission au marabout, qui se trouve ainsi maître de la plus vaste étendue de territoire qu’un chef nègre n’eut jamais eu en son pouvoir. De Médine à Tombouctou, et de Trengela au Sahara, tout était soumis à sa loi» écrit Eugène MAGE. En 1864, c’est dans le Macina qu’une révolte va bloquer El Hadji Omar. En effet, le Macina est vaincu, mais non soumis. Les Qadiri de Cheikh Bécaye complotent et pactisent avec la France. La conspiration entre les gens du Macina, les Bambaras et les Kounta de Tombouctou. Replié dans une grotte à Déguembéré, El Hadji Omar attend les secours de son neveu, Tidjani, qui arriveront, tardivement

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